Occitan, Estivada, animations moyenâgeuses ou médiévales ...
Mais que se passe-t-il dans la tête de mon peuple ?
Depuis que je suis à la retirada (la retraite), prononcer "rétirado" avec l'accent tonique sur le "ra", je peux enfin participer à certaines animations occitanes qui m'étaient interdites de par ma profession de boulanger.
Il est connu de toutes et de tous que dans notre pays, dénommé "le Midi" ou le "Sud de France » ou « SDF !" le pastis et la pétanque sont les principales activités. Pour ce qui est du “culturel”, seuls les beaux jours à touristes peuvent engendrer des "créations" locales.
C'est donc la quatrième fois que je participe à Rodez à la grande communion occitaniste de fin juillet : l'Estivada (prononcer éstivado, avec accent tonique sur "va").
20.000, 30.000 spectateurs passent quelques heures à écouter les différents groupes sur l'Esplanade, sans compter les rassemblements plus intimistes autour d'auteurs, ou dans le cabaret...
Au même moment des militants culturels ou politiques tiennent des stands pour expliquer : l'occitan, l’Occitanie, qu'es acò ?
Créé en 1995, c'était cette année la 20ème édition.
Quel résultat en tirer 20 ans plus tard ?
Lorsque je passe dans les petites rues de Rodez et que je parle avec des locaux :
— Ah vous êtes venu pour l'estivada (prononcé estivada comme en français !)
Dur dur sera le chemin :
— Six drapeaux français sur la façade de l'Hôtel de ville, pas un seul drapeau occitan !
— Mais je croyais que l'Occitanie c'était à Toulouse !
— Chez moi le patois c'est pour parler aux bêtes !
— Chez moi le patois c'est uniquement pour raconter des blagues !
Et puis il y a la récupération politique de certains partis français de "gauche" (un peu plus loin c'est la droite qui récupère)...
Mais qu'est donc devenu ce peuple contestataire, ce peuple des révoltes ! Ces militants de la première heure, sont-ils tous morts ?
Les survivants regardent maintenant vers ce sud, vers la Catalogne où un peuple sans complexe ose crier "in-dé-pen-den-cia" alors qu'ici ce même slogan effraie nos occitanisants (voire agonisants). Catalogne je t'aime, Catalogne tu es la "faraça" (le flambeau) grâce à qui nous pouvons espérer de voir un jour notre peuple se réveiller et constater qu'il est possible de dire non autant à Madrid qu’à Paris.
Et puis me voici de retour au pays, mon Ardèche.
Je ne vous parlerai pas des 260 km entre Saint-Remèze et Rodez parcouru en 5 heures, ou des 12 heures pour faire Guingan-Rodez en train ! C'est ça la "France profonde".
Donc retour au calme dans mon village.
Village artificiel comme tant d'autres.
Marché pour touristes, apéro pour touristes, champs de lavande pour les touristes, fêtes à l'ancienne pour touristes, nous sommes devenus de bien gentils Indiens. Je vois venir le jour où du premier juillet au 30 août les indigènes devront chausser les sabots pour recevoir les amis nordistes !
Donc, j'en viens tout naturellement aux animations "moyenâgeuses" et leurs variantes médiévales.
En 1900 et dans les siècles précédents la seule langue utilisée par les "gens du pays" était l'Occitan (dénommée "patois" par le pouvoir central et les collabos locaux). Faire appel au passé en oubliant la langue de nos aïeux est bien le signe d'une aliénation mentale et d'un comportement de colonisé. Il est de bon goût de défendre les vieilles pierres ou de faire revivre les anciennes traditions mais comme par hasard le plus important : la langue, est mise à l'écart. Les mairies préfèrent initier les enfants des écoles primaires à l’anglais. Quel intéret d'expliquer aux écoliers les noms de lieux issus de notre patrimoine occitan ?
Toutes ces manifestations pour touristes nous ramènent à la figuration et nous rapprochent des Indiens dans leur réserve.
Une fois encore, si je m'exprime en français, c'est dans le seul but de me faire comprendre par la majorité des Occitans à qui l'État Français a volontairement volé sa langue, sa culture, son passé, son histoire et son propre avenir.
Per acabar (pour finir) sur une note positive, n'oubliez pas que l'Histoire n'est jamais figée ; demain si le peuple occitan se réveille, s’il ose être lui-même, il pourra accéder comme les autres peuples à la reconnaissance internationale. Dix-huit millions d'habitants en Occitanie c'est bien plus que dans nombre de pays siégeant à l'ONU.
Nos anciens de Saint Remèze connaissaient bien ce mot qui nous a tué :
— nous avons "vergougno" de parler en patois, disaient-ils.
La France jacobine et républicaine a traumatisé de nombreuses générations. Quand un pouvoir donne à penser à ses citoyens que sa langue maternelle ne doit plus être parlée à ses enfants, cela porte un nom : génocide culturel.
Pire encore quand ces mêmes citoyens vont se faire tuer à cause de la France en ayant dans leur tête "pour la France"...
En conclusion, ce n'est pas en ratifiant la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires que le pouvoir parisien fera amende honorable et remettra à leur juste place les différentes langues assassinées indifféremment par les politiciens de gauche ou de droite.
Amis occitans, soyez adultes, devenez autonomes, laissez les partis politiques français aux collabos et rejoignez les différents mouvements autonomistes qui seuls seront à même de changer notre avenir.
Les Catalans, les Ecossais et tant d'autres réussissent, nous aussi nous le pouvons.
La "France" n'est pas UNE et n'est pas INDIVISIBLE. Le droit divin est mort avec la monarchie absolue, il n'y a pas de véritable démocratie sans la possibilité de disposer de son propre destin.
Pour une Occitanie libre, démocratique et fédérale.